Satyricon

Caligula traduit ici le Satyricon de Géomemphion du Cantal (1628). Le texte latin a été établi par Juliette Desjardins, participante des forums de langues anciennes.
 

Préface

Adulteratam mortalitatem in hac chartula saevienti calamo traduxi, Regum Potentissime, ea licentia qua priores suam satyram armarunt. Nemini itaque peperci. Et patricium et plebeium sanguinem, spirantes multos et aliquot funeratos, qui pari amentia exitialem peccandi dulcedinem amarunt, liberrima indignatione vexavi. Et si hic impetus inani tumore in sceleratos eruperit, quandiu atroci stylo aut saucianti lingua licebit infremere, nec funestos extinctorum manes, nec impuros viventium animos a meis execrationibus quiescere permittam.
Ô le plus puissant des rois, j'ai stigmatisé de ma plume enragée l'hypocrite humanité dans ce petit ouvrage avec la liberté même dont les Anciens armèrent leurs satires. C'est pourquoi je n'ai fait grâce de rien à personne. J'ai poursuivi de ma très libre indignation le noble et le roturier, moult vivants et quelques défunts, qui ont été séduits en une égale folie par la douceur pernicieuse de faire le mal. Et même si cet assaut contre les scélérats aura éclaté à cause d'un orgueil futile, aussi longtemps qu'il sera permis à une plume inflexible et à une langue acérée de se mettre en colère, je ne laisserai pas se reposer loin de mes imprécations ni les mânes funestes des morts ni les âmes impures des vivants.
Licet autem querelarum mearum acerbitas hic in omnium capita saevierit, nihil est quod te ab hac pagina publicae criminationis horrore debeat avocare. Non exarsit haec scribendi violentia in eos quos virtutes a consortione depravatae mortalitatis exemere. Sed cum hunc ingenii foetum plus in improborum ignominiam quam in spem propriae famae exulcerati animi imperio posteris tradere juberer, nolui tam foedam labem huic seculo imponere ut crederent nepotes neminem extitisse quem pestilens scelerum aura non afflasset.
Mais bien que l'âpreté de mes plaintes se déchaîne ici sur les têtes de tous, le frémissement de mon accusation publique ne devrait en rien vous détourner de ce livre. Parce que cette violence d'écrire ne s'est pas embrasée contre ceux que les vertus ont retranché de la communauté d'une humanité corrompue. Mais puisqu'il m'a plu de livrer à la postérité ce talent embryonnaire sous l'empire de mon cœur exaspéré plus contre l'ignominie des gens malhonnêtes que dans l'espoir de ma propre renommée, je n'ai pas voulu marquer ce siècle d'une tache si laide que nos descendants eussent pu croire qu'il n'y eût personne sur qui le vent pestilentiel des crimes n'ait pas soufflé.
Patere igitur, Principum Nobilissime, ut in hac papyro tuum nomen, quod iam celebritate gestorum utriusque solis metas implevit, posteritas agnoscat per scriptorem qui, nisi te fata terris feliciter commodassent, non dubitasset totum orbem uno libello proscribere. Neque hic meretricio sermone tuae Majestatis gratiam palpo.
Souffrez donc, ô le plus noble des Princes, que dans ce livre la postérité reconnaisse votre nom qui remplit déjà les confins de l'orient et de l'occident par la célébrité de ses actions, et ce par un auteur qui, si les destins ne vous avaient recommandé heureusement au monde, n'hésiterait pas à proscrire la terre entière sur une seule affiche. Et ici, je ne flatte pas votre gracieuse Majesté en un discours vénal.
Absit ut Gaeomemphionis genius Augustissimo Ludovico per adulationis fucum blandiendo hujus seculi bona corrumpat. Alium miseri alium felices sermonem usurpent. Sub optimo et omnibus optimis praestantiore principe suosque cives amore magis quam imperio coercente viventem decet libere loqui, non serviliter auribus insidiari.
Le Génie de Géomemphion n'irait pas jusqu'à corrompre les bontés de ce siècle en flattant le très Auguste Louis dans l'hypocrisie de l'adulation. Que les malheureux puissent user d'un autre langage que les gens heureux ! En vivant sous le meilleur des princes, et le plus exceptionnel de tous les meilleurs, qui contient ses sujets plus par affection que par autorité, il convient de parler librement et non d'être à l'affût de ses oreilles d'une manière servile.
Quod hic itaque libellus tui fastigii tholis appenditur, non offerentis devotioni, sed magnis tuis virtutibus donandum : quas si tacuissem, metuendum erat ne flagitia hoc volumine contenta ad severitatis tribunal per calumniam citasse accusaretur Gaeomemphio qui, ut odii saevitiam in vitiorum turpitudinem semper exercuit, ita optimae et ad solam virtutem natae indoli justissimi praeconii confessionem nunquam negavit.
C'est pourquoi ce livre est suspendu aux voûtes de votre fronton, non à la dévotion de l'offrant, mais en cadeau à vos grandes vertus : car si je les avais tues, il était à craindre que Géomemphion fût accusé de citer au tribunal de la sévérité les débauches contenues dans ce volume par pure calomnie, lui qui a toujours exercé la férocité de sa haine contre la turpitude des vices, et n'a jamais refusé l'aveu d'une très juste apologie au plus grand caractère né uniquement pour la vertu.
Vale, Regum Augustissime, et me tibi quondam opulentius donarium appensurum admitte inter cultores illarum virtutum quae te non modo Gaeomemphionis huic seculo irati indignationi, sed et acerbiori petulentia Momi Cachinno subducunt.
Salut, le plus Auguste des Rois, et, moi qui suspendrai un jour pour vous l'offrande la plus riche, acceptez-moi parmi ceux qui vouent un culte à ces grandes qualités qui vous soustraient non seulement à l'indignation de Géomemphion irrité contre ce siècle-ci, mais aussi au Rire rendu plus impitoyable par l'effronterie de Momus.
 

Satyricon

[I] Larvalem jam senescentis orbis turpitudinem in hac chartula velut ignominiosa Bupali tabula figuratam in cachinnorum circulos producere decrevi Gaeomemphio Cantaliensis. Quid liventi oculo audaciam consilii mei perstringis, adulterata Mortalitas ? Non accedo ad maledicendi violentiam ut mei nominis fama per tuam ignominiam ad postuma saecula transmittatur. Nec rumusculorum vanitate, nec inanibus constrepentis vulgi clamoribus sentio praecordia mea commoveri. Tibi ego hanc paginam meorum suppliciorum crudelitate et tuis sceleribus implebo, ut vel desistas foedam peccandi suavitatem amare, vel in cumulatiorem infelicis delatoris ignominiam ad nepotum notitiam per meas querelas tua flagitia decurrant. Tanta est enim acceptae injuriae indignatio ut censeri malim per tuam improbitatem quam fatuo silentio et degeneri patientia languescere.
[1] Moi, Géomemphion du Cantal, j'ai décidé d'exposer sur ce papier aux rires réunis en assemblées l'ignominie spectrale d'un monde déjà vieillissant et façonnée à la ressemblance d'un portrait dégradant de Bupalos. Hé quoi, Humanité hypocrite, tu jettes un œil pâle d'effroi sur la hardiesse de mon dessein ? Je n'en viens pas à la violence de médire pour que la réputation de mon nom se transmette aux siècles postumes grâce à ton infamie. Je sens que mes entrailles sont remuées non par la fausse gloire de cancanner ni à cause des cris inutiles d'une plèbe tapageuse. C'est pour toi que je remplirai ce papier de tes crimes et de l'inhumanité de mes souffrances, soit pour que tu cesses de chérir la laide douceur de faire le mal, soit pour que tes turpitudes à l'encontre de la honte trop surchargée d'un dénonciateur malchanceux viennent à la connaissance de nos descendants au moyen de mes plaintes. En effet, je suis si indigné contre une injustice reçue que je préfère être estimé grâce à ta méchanceté que de languir dans un silence sot et une vile soumission.
 

Commentaires

Préface

Momus était le dieu de la satyre.

 

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