Pendant le Bas-Empire, les spectacles étaient interdits le dimanche et les jours de fêtes chrétiennes.
Dans le Code Théodosien (II, 8), nous apprenons :
[XX] Festis solis diebus circensium sunt inhibenda certamina, quo christianae legis ueneranda mysteria nullus spectaculorum concursus auertat, praeter clementiae nostrae natalicios dies.
[XXIII] Die dominico, cui nomen ex ipsa reuerentia inditum est, nec ludi theatrales nec equorum certamina nec quicquam, quod ad molliendos animos repertum est, spectaculorum in ciuitate aliqua celebretur. Natalis uero imperatorum, etiamsi die dominico inciderit, celebretur.
[XXIV] Religionis intuitu cauemus atque decernimus, ut septem diebus quadragesimae, septem paschalibus, quorum obseruationibus et ieiuniis peccata purgantur, natalis etiam die et epifaniae spectacula non edantur.
[XXV] Post alia : dominica die, quam uulgo solis appellant, nullas edi penitus patimur uoluptates, etsi fortuito in ea aut imperii nostri ortus redeuntibus in semet anni metis obfulserit aut natali debita sollemnia deferantur.
[20, le 17 avril 392] Les jours de la fête du soleil, les luttes des jeux du cirque doivent être proscrites, afin qu'aucun rassemblement de spectateurs ne détourne des mystères respectables de la loi chrétienne, excepté les jours anniversaires de notre clémence.
[23, le 27 août 399] Le jour du Seigneur, à qui le nom fut appliqué à partir du respect pour lui, que ni les jeux théâtraux, ni les concours de chevaux, ni aucun des spectacles qui a été inventé pour amollir les âmes ne soit célébrés dans aucune cité. Mais que soit célébré l'anniversaire des empereurs, même s'il tombe le jour du Seigneur.
[24, le 4 février 405] Par égard pour la religion, nous prenons garde et nous décidons que les sept jours du Carême et les sept jours de Pâques, par les observations et les jeûnes desquels les pêchés sont purifiés, des spectacles ne soient pas donnés, ni le jour de la naissance du Christ ni de l'Épiphanie.
[25, le 1er avril 409] Après d'autres points : le jour du Seigneur, qu'on appelle communément jour du soleil, nous ne souffrons absolument pas que soient donnés des spectacles, même si par hasard, en ce jour ou l'anniversaire du jour du début de notre règne, les bornes de l'année revenant sur elles-mêmes ou le jour des solennités dues à l'anniversaire de naissance.
Jean Gaudemet écrit dans ses Institutions de l'Antiquité que « le Code théodosien est resté le code officiel en Orient jusqu'aux compilations de Justinien. En Occident, il eut valeur officielle tant que l'Empire subsista. Mais il survécut à l'Empire, car dans les royaumes barbares, il demeura la source essentielle de la connaissance du droit romain. Une partie considérable du Code théodosien fut reprise par les commissaires d'Alaric pour composer la Lex Romana Wisigothorum en 506, souvent désignée sous le nom de Bréviaire d'Alaric. Par cet intermédiaire, le Code théodosien fut la principale source de droit romain en Occident jusqu'à la renaissance juridique du XIIe siècle. »
De fait pour l'Occident, Anthème, un oriental de Cilicie, est nommé empereur le 12 avril 467 et ne « règne » depuis Rome et Ravenne que sur l'Italie et l'Espagne et ce nominalement, puisque le pouvoir réel est entre les mains du Suévo-Wisigoth Ricimer pour l'Italie et l'Espagne.
Les Vandales qui se sont déclarés libres gouvernent l'Afrique et la Sicile, les Gaules sont abandonnées aux Wisigoths, aux Burgondes, aux Gallo-Romains et aux Bretons, l'Espagne appartient aux Suèves et aux Wisigoths.
Nous lisons dans le Code Justinien (III, 12, 9, 1 à 3) :
Leo et Anthem. aa. Armasio pp.
Dies festos, dies maiestati altissimae dedicatos nullis uolumus uoluptatibus occupari nec ullis exactionum uexationibus profanari.
Dominicum itaque diem semper honorabilem ita decernimus uenerandum, ut a cunctis exsecutionibus excusetur, nulla quemquam urgueat admonitio, nulla fideiussionis flagitetur exactio, taceat apparitio, aduocatio delitescat, sit idem dies a cognitionibus alienus, praeconis horrida uox silescat, respirent a controuersiis litigantes, habeant foederis interuallum, ad se ueniant aduersarii non timentes, subeat animos uicaria paenitudo, pacta conferant, transactiones loquantur.
Nec tamen haec religiosi diei otia relaxantes obscaenis quemquam patimur uoluptatibus detineri. Nihil eodem die sibi uindicet scaena theatralis aut circense certamen aut ferarum lacrimosa spectacula, etiam si in nostrum ortum aut natalem celebranda sollemnitas inciderit, differatur.
Amissionem militiae, proscriptionem patrimonii sustinebit, si quis umquam hoc die festo spectaculis interesse uel cuiuscumque iudicis apparitor praetextu negotii publici seu priuati haec quae hac lege statuta sunt crediderit temeranda.
A. CDLXIX d. V id. dec. Constantinopoli Zenone et Marciano conss.
Caligula traduit ainsi :
Les augustes Léon et Anthème au préfet du prétoire Amasius.
Nous voulons que les jours fériés, les jours dédiés à notre très haute majesté ne soient occupés par aucun spectacle et qu'ils ne soient profanés par aucun tourment dû aux levées d'impôts.
Nous décrétons que le dimanche toujours digne d'être honoré est à ce point vénérable qu'il soit exempté de toutes exécutions, qu'aucun avertissement n'accable quiconque, qu'aucune perception de garantie ne soit réclamée, que les huissiers se taisent, que les avocats se cachent, que ce même jour soit étranger aux enquêtes, que la terrible voix du crieur public se taise, que les gens en procès se reposent de leurs controverses, qu'ils prennent une pause dans leurs pactes, qu'adversaires ils se rencontrent sans crainte, que le repentir réciproque pénètre leurs cœurs, qu'ils échangent des accommodements, qu'ils parlent d'accords.
Sans pourtant diminuer les loisirs de cette journée vénérée nous ne supportons pas que quiconque soit tenu occupé par des spectacles obscènes. Que le théâtre ne revendique rien pour lui ce même jour, pas plus les jeux du cirque ou les lamentables spectacles des bêtes fauves et, au cas où une fête solennelle à célébrer tomberait le jour de notre avènement ou de notre anniversaire, qu'elle soit reportée.
Si jamais quiconque aura cru devant être violé ce qui a été institué par cette loi en assistant aux spectacles en ce jour férié ou en étant appariteur de n'importe quel juge sous prétexte d'une affaire publique ou privée, il endurera la perte de sa fonction et la proscription de son patrimoine.
En l'année du seigneur 469, le 5 des ides de décembre [9 décembre] à Constantinople, sous le consulat de Zénon et de Marcien.
Les jours de jeux en l'honneur de divinités païennes tendent progressivement à être remplacés par des fêtes liées aux empereurs, comme les anniversaires de naissance, de début de règne, de victoires, d'aduentus...
Au IVe siècle, ils sont tous suivis d'un jour de jeux votifs : les ludi uotiui.
Les jours de fêtes dont il s'agit sont les célébrations du dies natalis de l'empereur : à partir des règnes d'Arcadius et Honorius, c'est-à-dire de 392 à 409, il est interdit de célébrer des jeux le dimanche, sauf à l'occasion de l'anniversaire de naissance ou de règne de l'empereur. Peu à peu, la législation va mettre fin à cette prérogative, en proscrivant que l'on donne des spectacles à cette occasion. Une loi de Léon Ier prévoyait de différer la célébration de ce dies natalis dans le cas où il tomberait un dimanche ou un jour de fête chrétienne.
Le seul point commun entre levées d'impôts et spectacles est leur interdiction à certaines occasions : les levées d'impôts doivent être interrompues les jours de fête, comme plusieurs autres actions dans le domaine juridique. Les spectacles les accompagnaient au contraire traditionnellement, mais sont considérés comme immoraux par les chrétiens. C'est pourquoi il n'était pas de bon ton dans un premier temps d'en représenter le dimanche, puis les autres jours de fêtes chrétiennes, et enfin, comme nous le voyons ici, pour l'anniversaire même de l'empereur.
Cette loi est très importante car elle fait date et met un terme à une ancienne tradition qui voulait qu'au lendemain du dies natalis, toujours accompagné de courses de chars depuis l'époque d'Auguste, on célébrât des jeux votifs, notamment au théâtre. Cette tradition s'interrompt donc définitivement en 469.
Lactance nous livre en outre dans ses Institutions divines (VI, 20) les raisons pour lesquelles étaient proscrits les spectacles pendant de tels jours :
Vitanda ergo spectacula omnia, non solum ne quid uitiorum pectoribus insidat, quae sedata et pacifica esse debent, sed ne cuius nos uoluptatis consuetudo deleniat et a deo atque a bonis operibus auertat. [...] Si quis igitur spectaculis interest ad quae religionis gratia conuenitur, discessit a dei cultu et ad deos se contulit, quorum natales et festa celebrauit.
Il faut donc éviter tous les spectacles, non seulement pour que rien des vices ne se s'enracine dans les cœurs, qui doivent être calmes et pacifiques, mais pour que l'habitude d'aucune volupté ne nous charme et ne nous détourne de Dieu et des bonnes œuvres. [...] Si donc quelqu'un assiste aux spectacles auxquels est adaptée la grâce de la religion, il s'est éloigné du culte de Dieu et il s'est tourné vers les dieux, dont il a célébré les anniversaires et les fêtes.
La loi s'est probablement appliquée uniquement à la partie orientale de l'empire, et semble être restée en vigueur après Léon Ier. Il est justement intéressant de souligner les différences régionales existant à cette époque entre l'Orient et l'Occident dans le domaine des jeux publics.
Cela dit, les « barbares » n'ont pourtant pas complètement éradiqué ces coutumes : Théodoric était par exemple très amateur de théâtre puisqu'il a même fait restaurer à Rome le théâtre de Pompée en 507-511 et reprendre la célébration des jeux (Cassiodore, Variae, IV, 51). Mais est-il allé jusqu'à faire célébrer son dies natalis par des jeux ?
Caligula, Iulius et Violaine.
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